
Maxime Boniface
La boucle à impact de la culture du champignon
Hamid Sailani et Maxime Boniface sont les fondateurs de Champiloop. L’histoire de l’entreprise commence en 2018, lorsque Hamid Sailani rejoint l’association GERM en tant que jeune ingénieur en génie agronomique. Fort de son expérience préalable en Iran dans le secteur des champignons, il décide de créer sa propre champignonnière en 2019. Rejoint en 2020 par Maxime Boniface, fraîchement diplômé de GEM, l’école de management grenobloise, l’équipe de Champiloop s’est engagée à créer une culture urbaine éco-responsable. Leur vision s’inspire de l’économie circulaire et du biomimétisme. Aujourd’hui, Champiloop incarne un modèle de production de champignons locaux et éthiques.
Bonjour Maxime,
Pouvez-vous nous raconter comment est née l’idée de Champiloop ?

Les fondateurs de Champiloop (Maxime Boniface à gauche, Hamid Sailani à droite)
Champiloop, c’est avant tout la rencontre de deux personnes. D’un côté, Hamid Sailani, ingénieur agronome formé en Iran, qui poursuit ses études en biologie, écologie et environnement en France. Il relance alors un projet qui lui tient à cœur : la culture de champignons. Accompagné par Pépite à Grenoble, un réseau d’accompagnement des étudiants entrepreneurs, il développe son projet et rejoint une champignonnière associative en tant que bénévole. En 2019, il reprend l’exploitation, avec la volonté de créer son propre emploi… et ses propres substrats !
De l’autre côté, je sortais de GEM, avec l’envie de monter une entreprise à impact. Les champignons m’ont rapidement attiré : ils poussent sur des coproduits (marc de café, sciure…), permettent de mettre en place une économie circulaire et répondent à des enjeux essentiels comme l’alimentation, la biodiversité ou l’accès à une nourriture saine.
Nous nous sommes rencontrés via le réseau Pépite. Et c’est fin 2019, début 2020, juste avant le Covid, que nous avons décidé de nous associer. Notre ambition : créer une entreprise à fort impact social et environnemental, en réhabilitant des lieux urbains pour y produire des champignons bio en circuit court.
Pouvez-vous nous expliquer comment le livre « L’économie Bleue » de Gunter Pauli a inspiré votre vision ?
Gunter Pauli est un entrepreneur belge qui défend une nouvelle forme d’économie : l’économie bleue, inspirée du vivant. Dans L’Économie Bleue, il prône un modèle sans déchets, où la production s’appuie sur les ressources naturelles et leur valorisation en cycles vertueux.
Un exemple : au lieu de jeter le marc de café, on peut l’utiliser comme substrat pour cultiver des champignons. On passe alors d’un seul métier (la vente de café) à plusieurs : récupération des déchets, agriculture, transformation alimentaire. On réduit les déchets, on crée de l’emploi, on produit de la valeur.
J’ai découvert ce livre en 2019, au moment où je cherchais une idée de projet à impact. Ça a été un vrai déclic. Il m’a ouvert les yeux sur les synergies possibles entre économie, écologie et innovation.
Quels sont les principaux objectifs de Champiloop ?
Notre première ambition est de démontrer qu’il est possible de créer une entreprise à impact social et environnemental, tout en étant économiquement autonome.
Nous réhabilitons également des lieux urbains abandonnés. Aujourd’hui, nous exploitons deux sites : une ancienne glaciaire du 19e siècle et un ancien parking, transformés tous les deux en champignonnières. C’est une façon de donner une nouvelle vie à ces espaces.
Nous produisons plusieurs tonnes de champignons bio chaque mois. Ce n’est pas seulement un projet pédagogique : notre objectif est aussi de nourrir, de créer de l’emploi agricole et d’offrir à notre équipe un cadre de travail épanouissant et responsabilisant. Nous sommes très heureux de la dynamique avec notre équipe.

Nous souhaitons également promouvoir une transition alimentaire : cuisiner maison, consommer des produits bruts, locaux, de saison. Et au-delà, faire connaître tout le potentiel du champignon et du mycélium. J’ai d’ailleurs consacré mon mémoire à l’économie du mycélium, un champ d’avenir selon nous.
Car le champignon ne se limite pas à l’assiette : il peut servir à fabriquer des isolants, dépolluer des sols, ou encore remplacer des matériaux industriels. Nous avons envie de faire connaître ces usages pour inspirer d’autres initiatives.

Comment fonctionne le processus de production de champignons chez Champiloop ? En quoi est-il différent des méthodes traditionnelles ?
Comme la plupart des producteurs, nous cultivons nos champignons sur un substrat, un support à base de matière organique. Mais notre particularité, c’est que nous sommes en milieu urbain et que nous produisons une grande partie de nos substrats nous-mêmes.
Concrètement, nous achetons de la paille ou des coproduits agricoles (résidus de noix, colza, tournesol…) directement auprès d’agriculteurs. Ces matières sont ensuite transformées dans notre champignonnière via un processus de pasteurisation, d’inoculation, d’incubation, puis de fructification.
Cela nous distingue des autres producteurs de pleurotes en France. Il n’existe que deux fournisseurs de substrats à échelle nationale (en Bretagne et dans l’Allier). En produisant nous-mêmes nos substrats, nous réduisons drastiquement les transports, ce qui est plus écologique et plus local.
Autre avantage : cela crée de l’emploi. Nous avons doublé la taille de notre équipe et développé un vrai savoir-faire artisanal autour de la culture du champignon.
Comment envisagez-vous l’avenir de Champiloop ? Avez-vous des projets ou des ambitions particuliers que vous souhaiteriez réaliser à l’avenir ?
Nous souhaitons surtout consolider notre modèle, ancrer davantage notre production localement et rester fidèles à nos valeurs. Bien sûr, des projets sont en réflexion… mais pour l’instant, on préfère les garder pour nous. L’essentiel est de continuer à avancer, en cohérence avec notre mission.
