Clémence Miray et Manon Dessirier-Bourges
Allonger le cycle de vie du mobilier
Clémence Miray et Manon Dessirier-Bourges ont quitté le monde de l’immobilier tertiaire pour créer Chaise_au_Carré. Cette jeune entreprise d’upcycling est spécialisée dans les chaises vintage, des assises de seconde main chinées et relookées pour des intérieurs design et de caractère.
Leur objectif : apporter à tout espace de vie, personnel ou professionnel, qu’il s’agisse de bureaux, d’hôtels, de restaurants ou de bars, de la convivialité, du beau, de la personnalité et surtout un supplément d’âme. Tout en défendant un engagement responsable, une durabilité et la transmission d’un héritage.
Nous sommes allées à leur rencontre.
Bonjour Clémence, Bonjour Manon,
Quel déclic vous a donné envie de créer Chaise_au_Carré et de concourir au développement de l’upcycling de mobilier ?
Clémence : Nous avons toujours été attirées par le design et le vintage. En pleine période du Covid-19 je faisais de la tapisserie sur mon temps libre et Manon rénovait à distance des chaises en bois. Nous étions des amies et travaillions toutes les deux dans le secteur du bureau. J’œuvrais dans la construction d’immeubles de bureaux et Manon dans l’aménagement immobilier. Le confinement nous a permis de faire des constats chacune dans nos métiers. Pour ma part, j’ai observé que les constructions se faisaient de façon plus vertueuse en tenant compte de l’environnement et de l’empreinte carbone. Manon a enregistré quant à elle de plus en plus de demandes de clients pour du mobilier responsable et vintage. À l’époque, peu d’acteurs produisaient du mobilier responsable neuf et aucun du mobilier de seconde main, de chine sur-mesure vintage.
À la sortie du confinement, nous ne pouvions que nous poser cette question « Pourquoi ne nous lançons-nous pas dans une entreprise de restauration de chaises à quatre mains ? ». Manon pour la rénovation du bois, moi pour la partie tapisserie, et c’est un peu comme ça que Chaise_au_Carré est née !
Chaise_au_Carré pour Sanofi. Design Saguez&Partner. Photographe Yves Duronsoy
Manon : Une fois lancées, nous nous sommes toutes les deux formées pour nous professionnaliser : en formation continue dans la tapisserie pour Clémence, via une formation bois à l’École Boulle pour ma part. Nous avions d’ores et déjà des clients demandeurs d’assises vintage un peu sympas et pas forcément de concurrence pour répondre à cette demande en 2020. À l’époque, les aménageurs nous disaient ne pas être en capacité de faire ce travail de chine et de restauration. Chaise_au_Carré est ainsi née un peu sur une opportunité et beaucoup sur l’envie de développer un modèle prenant en compte la problématique environnementale.
Quels sont les avantages environnementaux et esthétiques de l’utilisation de meubles de seconde main dans la décoration d’intérieur ?
Clémence : C’est le coup de cœur et l’authenticité, je dirais ! Il permet de disposer de pièces iconiques de caractère, de créer des espaces différents en redonnant aux assises d’antan leur splendeur. Il existe peu d’espaces dans lesquels vous mettez des pièces vintage qui vont se ressembler, alors que si vous prenez des pièces neuves…
Chaise_au_Carré pour Edgar Suites. Résidence Hoteliere La Boetie
Le vintage est également une alternative à l’achat de produits neufs. Il s’agit d’un choix responsable du consommateur ou du client B-to-B. Chez Chaise_au_Carré, nous avons vraiment développé un service de chine sur mesure à destination des professionnels et particuliers.
Nous considérons que le meilleur déchet est celui que l’on ne produit pas, c’est pourquoi nous partons de structures de chaises existantes, que nous réemployons. Le choix du vintage versus le choix du neuf représente au moins 80 % d’émission carbone en moins.
À quels défis inattendus avez-vous été confrontées dans cette nouvelle aventure ?
Manon : Au début, nous avons dû faire beaucoup de pédagogie auprès de nos clients, notamment expliquer comment acheter de la seconde main au lieu du neuf. En effet, la recherche de mobilier vintage ne fonctionne pas exactement comme la recherche de meubles neufs. Il fallait sortir tout un secteur professionnel du réflexe du catalogue. Aujourd’hui, c’est un peu plus simple car nous sommes parvenues à construire une offre aussi pratique pour les architectes que le neuf.
Il fallait également casser les préjugés et fausses idées sur le vintage : la malfaçon, la casse facile. Nous avons dû convaincre que nous proposions des pièces pour un usage intensif, durable, esthétique et que tout cela était garanti.
Enfin, il a fallu que nous procédions à un changement de volume conséquent en termes de quantité d’assises à chiner. Nous sommes en effet passées de la recherche de 15 pièces, à la restauration de 250 pièces sur certains projets. Nous avons vécu une grande montée en puissance. Nous avons rénové plus de 2 000 assises pour notre troisième année ! Il s’agit d’un beau défi que nous sommes fières d’avoir passé.
Avez-vous noté un regain d’intérêt pour les espaces responsables au sein des entreprises ou même des intérieurs de particuliers ces dernières années ?
Clémence : Complètement ! Je pense que depuis la période du confinement, nous constatons une certaine prise de conscience en matière de consommation, que ce soit pour l’ameublement, les vêtements, le bricolage, l’alimentation…, la tendance a beaucoup évoluée.
En ce qui concerne le mobilier, elle s’est tout d’abord opérée au niveau du particulier pour ensuite aller vers le secteur professionnel des bureaux, de l’hôtellerie-restauration et de toute typologie de lieux de vie. Nous avons aujourd’hui envie de nous sentir bien partout, dans les intérieurs comme dans les extérieurs, avec un cadre tendance, plus humain, plus responsable et de seconde main.
Manon : Nous notons également une envie de « ramener la maison au bureau » dans l’environnement de travail et de redonner aux salariés l’envie de revenir et parfois même de tenir compte de son souhait. Il s’agit d’une grande différence de matrice décisionnelle.
Clémence : Nous avons toujours été très bien reçues par nos prospects et clients, mais il y a eu, au départ, une certaine hésitation avant la concrétisation directe. Force est de constater qu’à présent, les clients qui sont demandeurs, proposent assez rapidement une idée de projet sur lequel ils souhaitent intégrer nos solutions. Il existe une véritable envie d’avoir de la seconde main vintage dans leurs propres bureaux et plus généralement dans tous les lieux avec des interactions humaines !
Manon : Nous étions des ovnis il y a encore 3 ans. Nous sommes à présent entrées dans les mentalités.
Comment voyez-vous l’avenir de Chaise_au_Carré au cours des prochains mois et années ?
Clémence : Nous espérons qu’il sera radieux ! Nous souhaitons faire rêver et vibrer particuliers et professionnels. Notre plus grande satisfaction est de participer à la co-construction d’un projet en mettant du mobilier vintage en lien avec l’identité souhaitée par nos clients, de voir cette identité prendre vie, être incarnée. Rien ne vaut des retours clients tels que « on adore l’espace ! » ou « on adore le mobilier ! ». Il s’agit de notre plus belle récompense.
Quels conseils donneriez-vous aux personnes souhaitant intégrer des éléments vintage ou upcyclés dans leur décoration intérieure ?
Clémence : Faîtes appel à Chaise_au_Carré ! [rires] Plus sérieusement, il s’agit d’un très bon choix qu’on ne regrette pas. Une fois que nous avons osé pour une première pièce, nous avons souvent envie de démultiplier l’initiative. Il s’agit aussi en quelque sorte d’un héritage à valoriser. Le mobilier est une belle chose à transmettre, notamment lorsqu’il s’agit de pièces qui ont de la valeur, de pièces de designers qui ne perdront pas de valeur dans le temps, qui sont iconiques et qui peuvent se transmettre de génération en génération.
Manon : Autant avoir l’original plutôt que la réédition, c’est un peu notre « mantra ». Pourquoi aller acheter la réédition ou la réplique faite en Asie alors que vous pouvez avoir la pièce originale, chinée en France, responsable et qui est déjà-là ?
Chaise_au_Carré pour DESKEO
Le mot de la fin ?
Meublez-vous vintage, si vous n’êtes pas encore convaincus !
Merci pour ces réponses !